Cesar de Ligny (editor), Les ambassades et negotiations de l' Illustrissime et Reverendissime Cardinal du Perron derniere edition (Paris: Pierre Lamy 1633), pp. 638-644:
Sire,
La nouvelle inopinee de la mort du Pape, de la guerison duquel, on avoit eu plusieurs esperances ces demierss jours, m’a fait écrire ce mot en haste, à vostre Majesté, par le Courrier de Monsieur l`Ambassadeur [Philippe de Béthune], afin de luy dire que, graces à Dieu, j'ay recouvert ma santé, assez à temps, pour luy faire service en cette occasion. Les Espagnols ont remué, ces jours passez, le Ciel et la terre, pour preparer les vœus à l’eslection du Cardinal de Come : mais ayons recogneu que le party de vostre Majesté, et de ceux qui luy adhereront en cefte exclusion, est trop fort, pour leur permettre d’en venir aisément à bout; ils commencent à fe jetter sur l’exclusion de ceux qu’ils pensent deuoir estre aggreables à V. M. et entre autres, des Cardinaux de Florence, et Baronius. Nous n'oublierons aucune chose de nostre devoir, sous la bonne et sage conduitte de Monsieur le Cardinal de Ioyeuse; pour faire qu’en ceste élection, Dieu soit servy, et V. M. contente. Quant à l' advis de Monsieur le Grand Duc, pour Salusses; je ne l'avois pas estimé si aisé à faire reüssir, que je me persuadasse d’en devoir rendre conte avec beaucoup de haste, à vostre Majesté : Neantmoins, pour ne croire point mon iugement en telles affaires, je penfay estre de mon devoir, de le luy representer. C'est chose, dont il ne traitta point avec moy, par maniere d’acquit, mais le plus serieusement qu'il put, et avec tant de passion, m’en ayant fait encore depuis plusieurs recharges, que je croy que rien ne luy tient plus au cœur, et qu'il ne pense point pouvoir par autre moyen establir aucune seureré, sous la protecttion de vostre Majesté, pour les Estars, et pour ceux de ses amys, en Italie. Et peut estre que la demonstration de conceder, en ce cas, quelque chose de son desir, et de ceux qu’il y veut embarquer auec luy, seroit un moyen propre pour l' engager, luy et eux, à entrepremdre des ligues, negotiations et dépenses, lesquelles encore qu’elles n‘arrivassent pas au but qu’il pretend, neantmoins produiroient des effets utiles, pour le service de vostre Majesté; et cela, sans qu’elle se mélast de rien,ainsi seulement les laissant faire, comme de chose commode à eux, et non à elle. Mais ce discours passe la portee de mon jugemcnt, et de mon experience, en matiere d'affaires. Le reste des nouvelles de ceste Cour, et particulierement pour le fait du Cardinal d'Est, je remettray à Monsieur l’Ambassadeur, le soin de l' écrire à vostre Majesté.
Et ce pendant, supplieray Dieu, Sire, la conseruer en toute sorte de prosperté.
D. V. M. Le tres-humble et tres obeyssant sujet et serviteur,
I. Cardinal du Perron.
De Rome ce 2. Mars 1605
John Paul Adams, CSUN
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