Charles van Duerm, SJ, Un peu plus de lumiere sur le Conclave de Venise et sur les commencements du Pontificat de Pie VII. 1799-1800 (Louvain: Ch. Peeters 1896), pp. 21-24:
Nous, François II par la grâce de Dieu Empereur élu des romains, toujours Auguste, Roi en Allemagne, de Hongrie, de Bohême, etc... de Dalmatie, de Croatie, d'Esclavonie, de Galicie, de Lodomérie et de Jérusalem, Archiduc d' Autriche, etc. etc.
Instruction et direction en vue de la future élection du Souverain-Pontife, destinées à Son Éminence et Père en Dieu, Monsieur François de la Sainte Église Romaine cardinal Herzan, du Saint—Empire Romain comte d'Harras, grand' croix de l`Ordre royal hongrois de Saint·Étienne, Notre conseiller secret actif et évêque élu de Stein am Anger.
Comme les circonstances, sous l'empire desquelles le conclave qui se réunit à Venise pour procéder à l'élection d'nn nouveau chef de l’Église, sont trop importantes et trop critiques pour ne pas réclamer toute Notre attention et Notre entière sollicitude, il Nous faut, dans le choix de M. le cardinal auquel Nous confions, au sein de ce conclave, le secret et l'exécution de Nos vœux et de Nos plans, prendre en très sérieuse considération non seulement ses appréciations, son expérience et sa prudence, mais encore tout particulièrement son zèle inébranlable pour travailler à la réalisation des ordres dont Nous le chargeons. Nous ne croyons pas pouvoir placer mieux Notre plus parfaite confiance que dans M. le cardinal Herzan, qui, Nous aimons à Nous le rappeler très gracieusement, Nous a déjà donné à Nous et à Notre illustre Maison des preuves nombreuses et très éclatantes des qualités énumérées ci-dessus et d'un dévouement inaltérable. Nous espérons également que dans cette circonstance d'une importance si capitale, la conduite et l'attitude de M. le cardinal Herzan répondront d`autant plus à Notre confiance que les vœux et les projets que Nous formons en ce moment n'ont pas d'autre but que celui-là même que Messieurs les cardinaux réunis en conclave seront appelés, par la voix de leur propre conscience et par leurs devoirs les plus sacrés, à prendre à coeur et à réaliser, au milieu de cette crise si décisive, pour le relèvement de la religion catholique, assaillie de toutes parts, et pour le bien de toute la chrétienté.
Les événements et les motifs, qui servent de base à Nos vœux et à Nos desseins,sont évidents par eux·mêmes aux yeux de tous ceux qui réüéchiront sans parti pris d'un côté aux maux présents et aux périls imminents, d'un autre côté aux espérances d'un meilleur avenir, que finissent par faire renaître l`excès même et l'expérience des calamités.
Il ressort de tout ceci une conclusion inattaquable, La répression de la tendance généralement répandue à l`incrédulité ainsi qu`à la manie de douter de tout et d`innover sans mesure; le triomphe à réaliser peu à peu sur cette tendance par le réveil, au fond du cœur de tous les hommes de bien, du sentiment religieux et du besoin de respecter la religion; enün le retour dans le sein du christianisme et à la soumission à l'autorité du pape, présupposent de la part du chef suprême de l'Église ces qualités de vraie humilité chrétienne, de patience, déloignement de toute préoccupation secondaire et de toute partialité, qui peuvent seules lui assurer l'affection et la vénération générales et contribuer à faire disparaître des maux dont la guérison complète ne saurait s'obtenir qu'avec le temps et gràce à des remèdes opérant avec douceur. Mais voici une seconde conclusion tout aussi indéniable. Cette œuvre si salutaire ne pourra se réaliser parfaitement et inébranlablement que si l’union la plus intime se voit très sincèrement rétablie entre la puissance spirituelle et la puissance temporelle et si l’on évite, avec tout le soin possible, de faire revivre entre elles ces fâcheuses divisions et collisions qui ont tant contribué à les atïaiblir et ébranler toutes deux. Si jamais il fut un temps favorable pour fonder pareille union, dont l'unique objectif serait le repos et le bien des peuples, c'est assurément l'heure présente. De nos jours en effet, des exemples si récents et si frappants viennent de mettre sous les yeux de tous les princes la nécessité de favoriser la religion. Ces mêmes exemples ont encore montré à tous les supérieurs ecclésiastiques la nécessité non moins grande où ils se trouvent de s‘assurer la confiance et l'appui des princes séculiers et de ne pas affaiblir l’union qui règne entre eux, en s'associant à des projets politiques d'où naîtraient des rivalités.
Nous nourrissons donc le consolant espoir que le cours et l'issue du présent conclave feront constater combien, Messieurs les cardinaux sont pénétrés de l'importance de ces vérités et des devoirs qu'elles entraînent avec elles. Nous espérons en outre qu'au sein du conclave, ils n'auront pas moins à cœur d'exclure des discussions toute influence de l'ambition et de la partialité que d'écarter les candidatures de ceux dont la nature des opinions, les antécédents, les principes et les relations extérieures ne cadrent pas avec les qualités énumérées plus haut et qui sont indispensables au futur suprême Pasteur de l'Église Catholique, ou sans lesquelles il ne se concilierait pas sulïisamment la confiance nécessaire des princes catholiques. Lorsqu'on juge les choses à ce point de vue, les importants services que Nous avons rendus et que Nous sommes résolu à rendre encore à l'avenir, en faisant sans Nous lasser tous les efforts et tous les sacrifices pour abattre l`ennemi de tout culte religieux et pour sauver l' Italie et l'autorité du pape, ne permettent pas de douter que Nos vœux et Nos projets uniquement inspirés par le bien public ne soient, comme ils le méritent, pris en très sérieuse considération par MM. les cardinaux encore sur un autre point. Le cas échéant, ils écarteront et comprimeront immédiatement les manœuvres et les tentatives électorales dont l`eff'et, si elles réussissaient, serait de préjudicier aux intérêts de Notre illustre Maison ou de contrecarrer ouvertement les entreprises et les mesures qui doivent achever la consolidation de la délivrance et du repos de l' Italie.
Néanmoins, pour que dans aucun cas Nous ne négligions rien de ces précautions que Nous sommes obligé de prendre, à. l'exemp1e de Nos prédécesseurs et en raison des droits et des devoirs les plus chers que Nous avons comme empereur et comme chef de Nos pays héréditaires, Nous espérons que M. le cardinal Herzan ne se contentera pas de contribuer de tout son pouvoir à un choix qui réponde aux vœux et aux plans que Nous avons déjà mentionnés à plusieurs reprises. Nous Nous attendons en outre à voir M. ·le cardinal Herzan Nous avertir en temps opportun de tous les progrès notables, mouvements et perspectives d'élection qui se présenteraient au cours du conclave. Il aura soin de joindre a cette relation une exposition très fidèle de ses appréciations personnelles au sujet des opérations électorales. Comme canal il prendra Notre ministre des conférences chargé des affaires étrangères et commissaire-général de l`ensemble de Nos possessions italiennes, le baron de Thugut. Nous Nous réservons de Notre côté, si, à l'encontre de toute prévision, les événements qui se produiraient au sein du conclave faisaient appréhender une issue qui ne répondit pas à Nos espérances et à Notre attente, de communiquer à M. le cardinal Herzan les instructions ultérieures réclamées par la protection que Nous devons à l’Eglise Catholique Romaine et par le bien général de l'Europe ainsi que par le bonheur de Nos États et de Nos sujets. La proximité du lieu où se tient le conclave Nous permet d`espérer que les informations de M. le cardinal et Nos observations éventuelles pourront toujours parvenir en temps utile. Si toutefois, il 'n'en était pas ainsi et s'il y avait lieu de craindre une issue précipitée et défavorable pour Nous, M. le cardinal s’emploiera à empécher de toutes ses forces une précipitation intempestive et dangereuse: au besoin même il recourra au plus énergique des moyens en usage.
Pour le reste, Nous plaçons Notre ferme confiance
dans la fidélité à toute épreuve, dans le zèle et dans
l'habileté de Monsieur le cardinal Herzan, auquel Nous
continuons avec satisfaction Notre faveur Impériale
Royale, Notre amitié et Notre entière bienveillance.
Signé à Vienne sous Notre sceau secret ici apposé,
le 26 novembre 1799. De Notre règne dans l'Empire et
dans les pays héréditaires la huitième année.
FRANÇOIS.
Baron de Thugut.
Sur l' ordre spécial de Sa Sacrée Maj. I et R. Ap. Egid. baron de Collenbach.
Both the General Instructions and the Secret Instructions, issued on November 26, 1799, were drafted by Baron Thugut [Duerm, p. 20].
The Conclave of 1800 is discussed by Chevalier François Artaud de Montor, Histoire du Pape Pie VII second edition (Paris 1837) I, pp 80-107 [He was an ultra-monarchist and an ultra-Ultramontane]. Cf. Comte Boulay de la Meurthe, "Mémoire d' Artaud sur le conclave de Venise," Revue d' histoire diplomatique 8 (1894) 427-448. .Also consult: Alberto Lumbroso, Ricordi e documenti sul Conclave di Venezia (1800) (Roma: Fratelli Bocca 1903) Eugenio Cipolletta, Memorie politiche sui conclavi da Pio VII a Pio IX (Milano 1863) [with documents, especially from Lord Acton and Naples]; Giovanni Berthelet, Conclavi, Pontefici e Cardinali nel secolo XIX (Torino 1903); Gaetano Moroni, Dizionario di erudizione storico-ecclesiastica Vol. 53 (Venezia 1851), s.v. 'Pio VII', pp. 116-118. Gaetano Giucci, Delle vite dei sommi pontefice Pio VII, Leone XII, Pio VIII, Gregorio XVI, per servire di continuazione a quelle di Giuseppe Novaes Volume I (Roma 1857) 39-48 [fulsome in praise of Pius VII]. Pierre Vachoux, Extraits inedits de la correspondance & des manuscrits du Cardinal Gerdil (Annecy 1867), Chapter II, pp. 39-56. Analecta Iuris Pontificii. Dissertations sur divers sujets de droit canonique, liturgie et théologie Troisième série, II. 1 (Rome 1858) 1107-1199. [Documents relating to Cardinal Gerdil]. Charles van Duerm, SJ, Un peu plus de lumiere sur le Conclave de Venise et sur les commencements du Pontificat de Pie VII. 1799-1800 (Louvain: Ch. Peeters 1896) Giovanni Berthelet, Conclavi, Pontefice e Cardinali nel Secolo XIX (Torino-Roma 1903). Fredrik Nielsen, The History of the Papacy in the Nineteenth Century (tr. A.J. Mason) Volume I (London: Murray 1906) pp. 191-218. R. Obechea, El Cardinel Lorenzana en el conclave de Venezia (1975). The alleged exclusion of Cardinal Gerdil by the pronouncement of Cardinal Herzan is discussed by Ludwig Wahrmund, Das Ausschliessungs-recht (jus exclusivae) der katholischen Staaten Österreich, Frankreich und Spanien bei den Papstwahlen (Wien 1888) 230-231. Giovanni Piantoni, Vita del Cardinale Giacinto Sigismondo Gerdil e analisi di tutte le stampate sue opere (Roma: Salviucci 1851). X. Barbier de Montault, Oeuvres complètes Tome troisième: Rome III, Le pape (Paris 1890), pp. 185-189 [the exclusiva: two kinds, defined and illustrated]
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