Auguste Carayon (editor), Documents inédits concernant la Compagnie de Jésus XVII (Poitiers 1869), LXXII., p. 192-193; and Crétineau-Joly, pp. 251-252:
Rome, le 18 mai 1769.
J' ai encore eu aujourd'hui une conversation avec Pozzoonelli en lui rendant la visite qu'il m'avait faite. Je l'ai trouvé furieusement impatato, comme on dit ici; mais je ne lui ai laissé aucune espérance. M. de Kaunitz, qui l'a vu hier, ne lui en a pas donné non plus. Cet ambassadeur a vu aussi le Cardinal Orsini et l'a mis fort à son aise sur le compte de Pozzobonelli. Il l'a chargé de vous instruire de ses sentiments à cet égard.
Le cardinal de Luynes vous dira la conversation qu'il a eue avec Paranciani. Si ce n'est pas une finesse de paranciani, il nous procurera des voix pour Ganganelli. Je vois que beaucoup de gens aiment mieux Ganganelli qu'un grand seigneur, et qu'on espère beaucoup de son application et de sa fermeté. Borromée est pour lui parmi les créatures de Rezzonico, et plusieurs autres qui n'osaient se déclarer, de crainte de se brouiller avec le neveu et de peur de l'opposition des Cours. Les cardinaux espagnols ont paru contents de la manière dont nous avons promis de les seconder pour Ganganelli: ainsi les nuages se dissiperont. Pozzobonelli est assez porté pour Ganganelli et je lui ai dit en confidence qu'il était un de ceux pour lesquels les Cours n'avaient aucune difficulté. Il m'a promis d'en faire usage et de me rendre reponse, en sorte que ce sera réellement nous qui procurerons les voix nécessaires à Sixte VI (car il devrait prendre ce nom-là). Cette affaire-ci sera décidée en bien ou en mal dans huit jours. Les Corsini nous seront fidèles....
Je suis fort content de la conversation que l'abbé de [Lestache], mon conclaviste, eut hier au soir avec le cardinal Ganganelli. Il l'avait désirée lui-mème. Il s'est expliqué fort bien sur les affaires qui interessent particulièrement la France ainsi que sur l'article des Jésuites et sur moi. Je vois qu'il est sûr des Albani et comme assuré de Rezzonico. Le concours des Albani prouve qu'ils y trouvent leur intérêt, même pécuniaire. Celui de Rezzonico annonce une élection prochaine. Elle ne se fera pas sans nous, comme vous voyez, Monsieur l'ambassadeur, et ce ne sera pas la derniére explication que j'aurai avec Ganganelli d'ici à quelques jours. Mais je n'en parlerai qu'à vous et à la Cour. Ganganelli a compté à sa manière sa négociation avec les Espagnols. Il n'est pas trop agréable de traiter avec des gens boutonnés quand on ne l'a jamais été, mais il faut tout sacrifier au service du roi....
... Les ouvertures que m'a faites le cardinal Ganganelli me mettent à portée de lui serrer le bouton sur les affaires qui intéressent le roi dans nos instructions. Il faut battre le fer pendant qu'il est chaud et profiter de la crainte qui accompagne toujours une grande ambition qui peut être traversée.
[après-dîner]
Si l'affaire de Ganganelli n'est pas faite en quatre jours, elle est manquée à jamais. Si M. Azpuru n'a pas conduit la négociation et que ce soit Ignace d'Aguire, elle doit être manquée aussi. Ignace est aux Albani, et nous en avons averti vingt fois les Espagnols. Ce qui me rassure un peu, c'est qu'hier au soir Ganganelli parla à l'abbe de [Lestache] non comme un pape à faire, mais comme un pape fait. Il traita l'affaire des Jésuites, celle de Parme, etc., en monarque; assura qu'il ferait tout par lui-même, que Rezzonico viendrait à lui que, quoiqu'on ne peut pas se fier aux Albani, il fallait les laisser dire, mais qu'ils viendraient. Or, s'ils viennent, il y a de l'argent; et s'il n'y a pas d'argent ils n'y viendront pas. Voilà en deux mots mon avis. reste à savoir si le moine accoutumé aux intrigues ne s'est pas trompé dans celle-ci. L'abbé de [Lestache] le verra ce soir, et je lui ai fait des instructions et toutes les demandes à faire. Les vôtres ne seront pas oubliées, ni les deux personnes qui ont démerité.... Marefoschi a grand peur de Ganganelli et m'a fait avertir du danger.
Auguste Carayon (editor), Documents inédits concernant la Compagnie de Jésus XVII (Poitiers 1869), LXXIII., p. 193-194:
18 au soir.
La chose s' avance.... J'ai averti les Espagnols pour leur faire sentir que, quand on est de concert avec la France, il faut qu'ellejoue le rôle qui lui convient. L' abbé de [Lestache] va à une heure de nuit chez le futur Pape. Il y porte un mémoire par où il est démontré que c'est à la France qu'il doit la tiare. Les articles principaux de nos affaires y sont exposés. J'ai chargé mon secrétaire d'apostiller ? (sic) tous les articles, en présence de Ganganelli, des réponses de cette Eminence afin d'établir de bonne heure la confiance entre le Roi et le Pape. Ce mémoire ne sera point laissé à Ganganelli....
In telling Pozzobonelli that the Courts had no difficulty with him, Bernis was lying. The Neapolitan Court had put Pozzobonelli in the category of those who suffered from lack of ability and were no papal material.
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