Sede Vacante 1549

November 10, 1549—February 8, 1550

Letter of D'Urfé, French Ambassador in Rome,
to King Henri II

(December 6, 1549)



Guillaume Ribier (editor), Lettres et mémoires d' Estat des Roys, Princes, Ambassadeurs et autres Ministres , sous les Règnes de François premier, Henry II, et François II   Tome second (Paris 1666), pp. 254-256:

Sire,

Messieurs les Cardinaux entrerent en Conclave Vendredy 29. du mois passé en deliberation sur l'heure de faire un Pape, comme fut fait Paul dernier; toutesfois j'ay pourveu aux choses avec telle diligence, que je les ay fait temporiser jusques aujourd-huy Mercredy 4. de ce mois, le quel jour de grand matin ay esté adverty que le Cardinal d'Angleterre [Reginald Pole, Archbishop of Canterbury] avoit toute la part Farnese et certains autres, jusques au nombre de vingt-deux voix, et n'en faut que vingt-huit pour estre Pape: outre ce, j'ay sçeu qu'ils diligentoient à faire cette élection, et que ceux de vostre part estoient trop foibles pour y resister; attendu qu'il n'est venu aucun de Messieurs vos Cardinaux François, et n'y avez icy que les trois accoustumez; à sçavoir Meudon, Armaignac et Lenoncourt, lesquels m'ont adverty que si je n' usois de quelque stratageme, les choses s'en alloient depschées. Sur l'heure je suis allé à la porte du conclave, et parlant au Maistre des ceremonies qui est dedans, je luy aiy dit pour faire entendre à Messieurs les Cardinaux, que j'avois eu nouvelles que ceux de France s'estant embarquez à Marseille, avoient courus fortune jusques a l'Isle de Corsique, duquel lieu ils avoient hazardé un brigantin pour me donner advis qu'ils ont esté arrestez audit Corsique en partie pour le mauvais temps, et en partie de ceux du pais, pour sçavoir et entendre quels gens ils estoient, et ou ils alloient mais qu'ils esperoient estre icy à la fin de cette semaine: et selon ce, je priois affectionnément tous Messieurs du Conclave de n'advancer cette élection jusques à la fin de cette dite semaine, auquel temps les Cardinaux François ouront estre icy: et qu'en cas qu'ils me voulussent nier cette juste demande, et voulussent frustrer vosdits Cardinaux de leurs voix, je protestois de vostre part, selon le pouvoir que vous m'en avez donné, de nullité de tout ce qu'ils feroient,et de non approuver leur élection: et pour ce fait, j'en ay appellé à tesmoins quatre Evesques qui sont a la garde dudit Conclave. Le Maistre des ceremonies m'a fait réponse qu'il l'alloit faire entendre à mesdits Sieurs les Cardinaux deputez qui sont six; ce qu'il a fait, et m'est venu faire response de leur part qu'ils en parleroient à tout le Conclave et qu'apres ils me feroient entendre leur volonté: et attendant ce qui se fera, j'ay bien voulu employer le temps a vous toucher quelques articles concernans ce fait; le premier, sera de vous faire entendre, Sire, que je n'ay aucune nouvelle de vosdits Cardinaux depuis l'arrivee du Boiteux, qui les laissa à Moulins, lequel me dit qu'ils avoient arresté de venir par Mer: depuis, le temps a esté si contraire, qu'ils n'ont pu venir, ny aucunement m'advertir de leur fait qui me met en la peine que vostre Majesté peut estimer; et ce qui m'a fait user de la protestation susdite, a esté, qu'estant adverty que Farnese avoit recherché le Cardinal d'Angleterre à le faire Pape, pour une seureté qu'il avoit de luy, au cas qu'il le fust, de rendre Parme à son frere le Duc Octavio, usant en cela de son accoustumé scruple, approuvant ledit Duc Octavio pour vray heritier et successeur de parme, attendu que l'Eglise en avoit pris recompense de la Duche de Camerin, ledit Farnese a éleu celuy-la pour celuy qui luy a semblé le plus simple, et à qui plus aisemént il persuaderoit sa volonté: et en defaut de luy, met en avant Sfondrat avec toutes les diligences qu'il peut. Par le moyen de vos Ministres, Sire, la force de Rome a esté mise netre les mains du Duc Horace [Orazio Farnese, nephew of Paul III], mais depuis il a appellé Alexandre Vitelle, et plusieurs autres aussi bons Imperiaux, comme il doit estre François, pour ses Lieutenans; de sorte que pour cette heure, je ne pense pas qu'il peust commander chose contre l'Empereur, s'ils faisoient quelque entreprise icy; ce qui est tousjours à douter, et mesmement si Messieurs vos Cardinaux François fussent arrivez, il eut pu craindre d'estre le plus foible en Conclave, et eut voulu se fortifier dehors: mais voyant qu'ils ne sont point venus, il estime sa part audit Conclave la plus forte, estand jusques-icy unie à celle de Farnese; deux heures pares je suis retourné au Conclave, et ay fait en sorte que les six Cardinaux deputez sont venus parler à la porte; à sçavoir Trany [Giovanni Domenico de Cupis], Carpy [Rodolfo Pio di Carpi], la Coine [? Marcello Crescenzi, Administrator of Conza?], Saincte Flour [Sforza], Farnese et Ferrare [D'Este], à la presence desquels j'ay encore fait entendre la prompte arrivée de mesdits Sieurs vos Cardinaux, et ay prié tout le College de les attendre pour toute cette semaine, et en defaut qu'ils ne le voulussent faire, de vostre part je protestois de nullité, de tout ce qu'ils feroient: ils ont voulu voir mon pouvoir, je l'ay mis entre les mains de Trauy, comme Doyen, lesquels m'ont dit qu'ils le communiqueroient à tout le Conclave, ensemble ce que j'avois desia dit, et qu'apres ils me feroient reponse, ce que je pense qu'ils ne feront, attendu que je cory qu'ils ont resolu de faire ledit Angleterre Pape, lequel, comme j'ay entendu en escrivant la presente, a augmenté de trois voix encore, qui sont vingt-cinq, et ne luy en reste plus qu'autres trois pour les vingt-huit qui y sont necessaires; toutesfois, ou ma susdite protestation, ou les stratagemes dont il m'a fallu user, ont causé que la chose ne se soit pas si tost resolue: vous asseurant, Sire, que je n'ay oublié en ce fait toutes les feintes et cauteles qui se peuvent apprendre en ce pais, dont je me suis aidé au lieu de la force, qui n'est pas maintenant pour moy: tant y a que mes diligences n'ont esté si vaines, que je n'aye fait differer ladite élection six jours entiers, attendu qu'aujourd'huy est le huictiesme qu'ils sont au Conclave, et en deliberation de faire un Pape le deuxiesme jour, lequel encore n'est conclu, et feray toushours le mieux que je pouray pour differer: ce qui pour l'advenir me sera fort difficile, attendu que l'on m'a fait response que sous ma parole l'on a attendu Messieurs les Cardinaux François vingt-neuf jours apres la mort du Pape, et qu'il n'est plus possible de differer: et que quant a la Protestation que j'ay faite que vous estiez Prince de nom et d'effet si chrestien, que vous auriez toujours agreable tout ce qui se fera avec fondement et raison: et que leur election sera si sincere et juste, que vous, comme premier fils de l'Eglise, ny Prince de la Chrestiente n'aura occasion de s'en fascher. Sire, ce sont tous propos qui monstrent que le Conclave ne peut plus attendre; toutesfois je ne laisseray pour cela d'obstinement suivre mes coups, par le moyen que j'ay trouve d'entendre tous les jours seurement ce qui se fait au Conclave.

Sire, achevant cette present, la Garde est arrivé, qui m'a apporté les lettres, lesquelles contiennent creance de ne point m'advancer à baiser les pieds du Pape s'il est autre que je le desire, avant d'avoir sçeu vostre intention: ce que je trouve si raisonnable, qu'il n'est rien plus: car, Sire, je demeureray en cette opinion que moins vous chercherez les Papes, et plustost vous les trouverez: car je ne puis comprendre que vostre aide ne leur soit plus necessaire que la leur à vous.

Sire, Monsieur le Prince de Melphe m'escrit par la Garde, qu'il a asseurance par un Personnage envoyé exprés, lors de nouvelles de la vacation du S. Siege, qu'il a encore à Trente, onze Evesques, tant Neapolitains que Siciliens, avec nombre d'autres Prelats: et que là il se dit publiquement que le Cardinal de Trente a commission de l'Empereur, si l' élection du Pape ne se fait à sa devotion, de protester qu'il n'appartient pour cette heure à autre de faire telle élection, sinon à ceux qui sont du Concile, qu'eux entendent estre audit Trente, et non ailleurs.

A Rome, ce 6. Decembre 1549.           D' Urfé


The Prince of Melphi was Giovanni Caraccioli (ca. 1480-1550), Grand Seneschal of the Kingdom of Naples, Marshal of France. See Pierre de Bourdeilles, Abbé et Sieur de Brantôme, Oeuvres completes (ed. P. Mérimée and L. Lacour) Tome II (Paris 1858) Les vies des grands Capitaines du siècle dernier ... Capitaines estrangeres, Livre I, chapitre XXXI, pp. 234-246.

 

 

January 19, 2014 9:58 PM

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