Guillaume Ribier (editor), Lettres et mémoires d' Estat des Roys, Princes, Ambassadeurs et autres Ministres , sous les Règnes de François premier, Henry II, et François II Tome second (Paris 1666), pp. 263-264:
Mon Cousin,
Je crains merveilleusement que la longueur ne vous fasse perdre des occasions que vous avez eu presentes, lesquelles maintenant se trouveroient par advanture difficiesà ramener. cependent je ne voy point nos forces augmenter, mais diminuer: l'un est contraint de desemparer vostre compagnie pour sa maladie, comme le Card. de Boulogne; l'autre meurt, comme a fait le pauvre Ridolphy, auquel j'ay tel regret que vous pouvez penser: et par une si longue prison, si elle continuoit encore quelque temps, il y en a d'autres de vostre troupe qui pouroient tomer en un mesme inconvenient, qui ne seroit pas pour amander nostre marché: si vous venez a estre reduits a la necessité de faire un Pape, pour lequel vous aurez longuement marchandé à vous declarer, comme pouroit estre Brusquet ou quelque autre qui aura connu vos desseins, assurez vous que quelque bonne mine qu'il vous fasse de remerciement et autres actions de graces et promesses, estant parvenu a ce but, il sentira en l'interieur son obligation n'estre pas forte envers vous et moy, puis ue par la necessité vous aves esté conduits à faire pour luy, et s'en voudra quelque jour prevaloir s'il est de coeur: et aussi il faut que vous tous unanimément, j'entends ceux dont je fais estat, vous recommandiez à Dieu, afin qu'il luy plaise vous faire cette grace de pouvoir promptement disposer des moyens que vous avez à resoudre le fait de cette élection en la personne de l'un d'eux que par ordre je vous ay nommez, s'il est possible, et vous ouvrir si bien les yeux, que vous puissiez au mesme instant connoistre celuy sur lequel le sort est plus facile et aisé à faire tomber sans difficulté, pour oster cette longeur dont il ne peut reussir que mauvaise issue.
Et n'est pas l' Empereur mesme, à ce que j'ay entendu, qui ne l' ait blasmée fort, alleguant que la Germanie voyant le Conclave en telles combustions, dont elle se mocque, augmente tous les jours ses erreurs contre la Religion, et pour un Lutherien qu'il y avoit auparavant la vacation du Papat, il y en a maintenant quantité.
Quant à nos affaires de deçà, je ne vous en sçaurois mander autre chose, sinon que mes deputez et ceux d' Angleterre se doivent assembler et aboucher pour negitier la paix d'une part et d'autre; enquoy les Anglois, glorieux comme ils sont de nature, quelques necessitez qu' ils ayent, ont fait au commencement bonne mine à mauvais jeu, pour faire leur conditions meilleures et plus advantageuses: et en cela je ne leur veux rien ceder, ny laisser passer; car je sçay bien où ils en sont logez, neantmoins je veux bien que l'on connoisse par tout que je ne dédaigne pas la paix et l'union, pour le respect du bien commun et general de la Crestienté, et non pour autre chose; car si lesdits Anglois veulent faire autrement, et qu'il faille pour paracheuer sur ce temps nouveau, le jeu que je commencay l'année passee, j'employe l'argent que je leur pourois bailler, accordant et pacifiant avec eux, j'espere qu'avec mes preparatifs et bonnes provisions que j'ay. sans m'amuser à leurs belles paroles, je leur feray connoitstre, et leur prouveray par le tesmoignage d'une bonne troupe de Gens que je leur meneray, que l'un leur estoit beaucoup meilleur que l'autre.
Au regard de l'Empereur, encore qu'il ne sente quasi plus de mal, il est demeuré extremement foible et debile, courbé et retrait de ses membres; de maniere qu'il ne peut d'une bonne espace de temps se mettre en estat de voyager.
A Fontainebleau, 6. Fevrier. [1550]
©2011 John Paul Adams, CSUN
john.p.adams@csun.edu